Frédéric Vuillaume en garde à vue, pour avoir manifesté
19 mars 2024
Emma Audrey (159 articles)
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Frédéric Vuillaume en garde à vue, pour avoir manifesté

C’est devenu malheureusement une habitude. Digne d’un état autoritaire, une procédure qui laisse perplexe; priver de liberté une personne pendant 16 heures pour avoir essayé d’exercer l’unique droit qui fait la différence entre un état autoritaire et une démocratie: le droit de manifester. Cela s’est passé à Montbéliard, lors de la venue du premier ministre, Gabriel Attal.

Le jeune premier ministre s’était rendu à Montbéliard ce 16 mars, pour assister au « Joyeux Bazar », la fête inaugurale de « Capitale française de la culture 2024 » qui avait lieu à Montbéliard. Et hasard du calendrier, il avait déclaré dans la presse, profiter aussi pour « fêter son anniversaire ».

Comme d’habitude pour ce genre de déplacement, avant l’arrivée du Premier Ministre, une poignée de manifestants venus dans le cadre d’une manifestation syndicale spontanée, avaient comme plan de scander des slogans contre la politique du gouvernement. Mais, cela ne s’est pas passé comme prévu.

Quelques minutes avant l’arrivée du premier ministre, Frédéric Vuillaume, syndicaliste bisontin Force Ouvrière, a été interpelé et porté littéralement par les pieds par des policiers : « ils sont directement arrivés sur moi, ils sont venus à dix pour m’arrêter et me soulever pour me porter directement dans le fourgon de police. Ils m’ont reproché une manifestation non déclarée » nous a expliqué le syndicaliste joint par téléphone.

16 heures de privation de liberté, 5 jours d’ITT

Il s’en est suivi une privation de liberté (placement en garde à vue) pendant 16 heures pour qu’il soit libéré dans la matinée de dimanche, avec un classement sans suite. Et de plus, cette arrestation violente a laissé des séquelles. 5 jours d’ITT prescrits pour le syndicaliste, les menottes ont été serrées à un tel point, que ses poignets ont fini abîmés.

C’est la énième arrestation, GAV et interpellation de Frédéric Vuillaume. Nous avons interviewé et échangé avec le syndicaliste à des nombreuses reprises sur ces situations. Radio France lui avait consacré l’un des podcasts « Comme un bruit qui court » . Une bis repetita qui tourne en boucle depuis qu’il a été désigné leader des Gilets Jaunes à Besançon en 2018.

De façon factuelle, nous sommes devant un syndicaliste qui exerce son droit le plus élémentaire: le droit de manifester. Jusqu’à ce jour, personne n’a pu lui reprocher autre que sa voix qui porte et son message. Un manifestant pacifique, membre du syndicat Force Ouvrière et surtout un ouvrier qui milite pour un autre monde, plus juste, plus équitable.

Tout ceci lui vaut aujourd’hui d’être la cible préférée des forces de l’ordre à Besançon. Pour preuve, de l’ensemble des manifestants, il est à nouveau le seul à avoir été interpellé et placé en garde à vue.

Ainsi, le premier ministre, a pu fêter sa 35ieme année correctement, sans avoir à être dérangé par un quelconque slogan venu gâcher sa fête.

*Le syndicaliste a annoncé son souhait de porter plainte pour l’arrestation, qu’il considère abusive

 

L’antenne régionale du syndicat FO a publié dans la foulée un communiqué de presse :

« Ce 16 Mars 2024, Gabriel Attal est en visite à Montbéliard (25) pour l’ouverture de la cérémonie « capitale Française de la culture ». A l’appel du syndicat Force Ouvrière Conseil régional Franche-Comté-Bourgogne, un rassemblement est organisé pour accueillir le premier ministre.

Alors que la manifestation se passait bien pendant presque une heure, que des slogans ont été repris par les quelques manifestants présents, quelques minutes avant l’arrivée du locataire de Matignon, une dizaine de policiers encerclent Frédéric Vuillaume le secrétaire de notre Syndicat, et décident de procéder à son arrestation en le soulevant par les jambes, par les bras pour l’emmener manu militari dans le fourgon et le mettre en garde à vue pour organisation de manifestation non déclarée.

Notre Syndicat Force Ouvrière CRFCB condamne avec fermeté les pratiques de répression policière contre notre camarade Frédéric Vuillaume, qui est contraire au droit fondamental de manifester, un droit qui découle de l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

Les forces de l’ordre à la botte du pouvoir sont régulièrement pointées du doigt pour violence contre des manifestants. Nous avons pu le voir pendant les gilets jaunes ou la réforme des retraites, où des citoyens ont eu des membres arrachés, éborgnés et mis en garde à vue illégalement.

Pour notre secrétaire Frédéric Vuillaume nous assistons à un véritable acharnement, c’est sa neuvième garde à vue occasionnant 166 heures de privation de liberté, 4 procès en correctionnel et une vingtaine d’amendes, simplement pour avoir défendu ses convictions militantes et fait valoir son droit à manifester et de revendiquer. Une véritable cabale est orchestrée par un pouvoir impopulaire en perdition qui piétine la démocratie. Notre secrétaire est sorti de sa garde à vue au bout de 16 heures (affaire a été classée sans suite) et a eu 5 jours d’ITT à la suite de cette interpellation brutale et choquante.

Force Ouvrière CRFCB, apporte tout son soutien à notre secrétaire Frédéric Vuillaume victime de répression policière, cette interpellation est une grave entrave au droit de manifester.

Emmanuel Macron critique les méthodes de certains pays autoritaires, comme la Russie, mais devrait balayer devant sa porte avant de critiquer les autres. La France, pays des libertés individuelles et de la liberté d’expression, bascule petit à petit vers un système autoritaire, répressif où les représentants syndicaux qui défendent avec force et détermination les intérêts des salariés comme Frédéric Vuillaume sont muselés.

Pour Force Ouvrière Conseil Régional Franche-Comté-Bourgogne. Alexandre SCIBOZ, Secrétaire Adjoint »


Frédéric Vuillaume est très bien connu en France. Dans le passé, Amnesty International lui avait dédié une partie du documentaire « Présumé coupable ». Un premier documentaire de 52 minutes qui donnait la parole aux personnes qui se sont retrouvées devant la justice pour avoir simplement manifesté pacifiquement (voir ici) 

Pour reprendre les mots d’Amnesty International « Frédéric Vuillaume, militant syndicaliste français  est la cible régulière des autorités. Il n’a fait que manifester, et pourtant, il est accusé »

Ce qui a choqué le plus le syndicaliste dans cette énième arrestation, c’est la violence absolue de l’interpellation et surtout le silence autour de cette privation de liberté. « Plus personne ne réagit, on a habitué la population à ce genre de privation de libérté

Vidéo de son arrestation

Dans cette petite séquence filmée avec son propre téléphone (à laquelle s’ajoute une courte séquence été filmée par un camarade), on voir le syndicaliste porté par les policiers par les pieds, pour y être jeté dans la voiture. Une fois dans la voiture, les policiers lui indiquent le début de sa garde à vue et s’empressent de lui arracher le téléphone de sa main, alors qu’il était menotté, les mains dans le dos.

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Emma Audrey

- Journaliste grand reporter.