Besançon : entre l’association SolMiRé et l’Aide Sociale à l’Enfance du Doubs, le torchon brûle
Alors que le « squat Tarragnoz » a été expulsé fin août, la question des « Mineurs Non Accompagnés » (MNA) suscite toujours de vives tensions. Entre les services de l’Aide Sociale à l’Enfance et l’association SolMiRé, la bataille s’est engagée quant au sort d’un jeune ivoirien arrivé début septembre dans la capitale comtoise. Une trentaine de militant.e.s ont occupé hier le site du 18 rue de la Préfecture, bien décidés à faire entendre leurs voix. Installés à partir de 16h00, ielles ont été délogés par la police après trois heures d’action… sans obtenir gain de cause.
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« Je hais cet accidentel repentir que l’âge apporte. »
Au cœur du litige, l’authenticité d’un passeport. Celui-ci a été reconnu par la Préfecture du Doubs, décision qui figure dans divers rapports que nous avons pu consulter. Un élément jugé décisif par les membres de Solidarité Migrants-Réfugiés (SolMiRé), qui brandissent une jurisprudence en ce sens (C.cass civ.1er n. 19-17726 du 21 novembre 2019). « Selon la cour de cassation, cette pièce constitue ainsi un document d’identité valable pour établir la minorité. Il ne devrait même plus y avoir de débat, le Département ne respecte pas ses obligations ! » avance Noëlle Ledeur.
Une défense insuffisante pour Cyril Carbonnel, directeur-adjoint du pôle solidarités : « Nous ne faisons qu’appliquer la loi, laquelle exige que nous prenions en compte un faisceau d’indices. Le passeport seul ne nous paraît pas donner toutes les garanties en la matière, d’ailleurs certains actes même véridiques peuvent être achetés. Les mises à l’abri sont systématiques au lancement de la procédure, laquelle débouche sur un entretien dédié afin de trancher des suites. C’est à ce moment là que nous avons considéré ce jeune homme comme majeur, donc qu’il ne dépendait pas de nous. »
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Trois-cent dossiers examinés chaque année.
L’argumentaire est dénoncé par l’association, qui pointe des méthodes qualifiées d’arbitraires. « Le SEAMNA (Service d’Évaluation et d’Accompagnement des MNA) se base sur des critères aussi peu fiables que l’apparence physique ou l’existence d’incohérences dans le récit. Avec un contexte de précarité, de peur, de violences, qui peut attester de chaque localité traversée sur un tel trajet ? » s’emporte notre interlocutrice. « Nous avons examiné environ trois-cent dossiers en 2022, dont 50 % ont été acceptés. C’est un taux supérieur à la moyenne ! » répond Cyril Carbonnel.
Un chiffre relativisé par Noëlle Ledeur, qui considère cette donnée brute peu parlante : « En Côte-d’Or par exemple, on est sur 70 % de refus en effet. Pour autant derrière les prises en charge sont plus volontaires, là-bas une personne déboutée n’est généralement pas laissée à l’abandon. Une différence de traitement avec le Doubs, car si vous n’êtes pas retenu ici le plus souvent vous finissez à la rue. » Malgré la réception d’une délégation, le dialogue est resté sans issue. Mais les soutiens ne comptent pas en rester là, envisageant de saisir les tribunaux administratif et pour enfants.
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