Besançon : Carrefour attaque ses salariés grévistes en justice, la multinationale déboutée et condamnée
Malgré des gains records en 2021, le groupe Carrefour suscite une vive contestation interne. Plusieurs milliers de salariés étaient ainsi en grève le 24 septembre dernier, revendiquant des avancées concrètes quant à leurs salaires et conditions de travail. Une fronde qui a également secouée Besançon, les hypermarchés de Chalezeule et Valentin ayant été fortement impactés. Mais pour ce dernier site, le bras de fer syndical a viré au règlement de compte judiciaire. Au grand dam de la multinationale, déboutée et condamnée dans un jugement aux conclusions sévères.
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Le samedi 24 septembre dernier, une importante grogne nationale touchait les quelques 3 500 sites du groupe Carrefour. Dans l’agglomération de Besançon le mouvement a surtout été suivi aux sein des hypermarchés de Chalezeule et Valentin, avec environ 70 % de salariés grévistes dont une cinquantaine en action. En cause ? le milliard d’euros de bénéfices nets enregistrés pour l’année 2021, en rapport avec des augmentations de salaire jugées insuffisantes et des conditions de travail vécues comme toujours plus difficiles par les 320 000 petites mains de la multinationale.
Une contestation visiblement peu appréciée par certaines Directions, la plupart allant jusqu’à recourir à des constats d’huissiers et à des poursuites de son personnel devant la justice. C’est le choix opéré par les responsables du Carrefour de Besançon-Valentin, qui a ainsi engagé un référé visant dix syndiqués de Force Ouvrière. Il leur était reproché d’avoir barricadé divers passages par des caddies et sit-in, modalités décriées comme « occasionnant un préjudice économique et financier conséquent pour l’entreprise » dont la crainte de potentielles réitérations a motivé cette procédure.
La société réclamait l’interdiction de tout futur « blocage » sous peine de 1 000 euros par infraction, l’expulsion immédiate des personnes « perturbant » l’accès au site y compris par la police, ainsi que le versement de 4 000€ en plus des frais de justice par les défendeurs. Ces derniers ont dénoncé une « entrave au droit de grève », s’appuyant sur des photographies et attestations démontrant l’absence d’obstructions complètes et l’arrêt de leur mobilisation. Ils ont été entendus : Carrefour est non seulement déboutée, mais doit aussi s’acquitter des dépens et de 4 000 euros aux accusés.
« Il ressort de l’ensemble des pièces […] que les grévistes ont organisé non pas un blocage total du magasin mais des barrages filtrants avec distribution de tracts pour sensibiliser la clientèle à leurs revendications » ont notamment tranché les juges, dans une ordonnance dont nous avons obtenu copie. Lesquels concluent par ailleurs que « les mesures sollicitées par la SAS Carrefour ne peuvent avoir pour objet de lui permettre de s’opposer de manière générale et systématique à tout mouvement de grève si besoin avec le concours de la force publique. »
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