Le 22 décembre, le centre-ville de Besançon accueillait l’acte 6 des manifestations « Gilets Jaunes ». Yves Faucoup, qui fut travailleur social de terrain, responsable syndical, directeur de la revue franc-comtoise d’informations générales L’Estocade et qui est actuellement blogueur sur Médiapart (Social en question) a vécu cette journée au milieu des manifestant.e.s. Voici son témoignage
La manifestation des Gilets jaunes a rassemblé 800 personnes cet après-midi à Besançon. Partie de la place de la Révolution surplombée par la grande roue, elle a déambulé dans les rues, avec hésitation et désaccords sur le parcours à suivre, certains redoutant les souricières et autres rues en goulots d’étranglement favorables à une action policière.
Les slogans étaient anti-Macron (« Macron t’es foutu, les Français sont dans la rue ») ou révolutionnaires (« Soulève-toi, Besac Debout »). La Semaine sanglante est entonnée (« quand tous les pauvres s’y mettront »). Si le RIC est présent sur des pancartes, des affichettes, parfois discrètes, en appellent à des actions dans les entreprises, à la hausse des minima sociaux (c’est si rare que cela mérite d’être relevé), et précisent : « Fâchés, pas fachos ».
Entre deux Marseillaises chantées le poing levé, on entend : « Les jeunes dans la galère, les vieux dans la misère, de cette société-là, on n’en veut pas ». Une mendiante, main tendue, marmonne : « Sortez Macron ». L’humour est de la partie, dans une rue aux larges dalles, un cri : « changez de rue, les pavés sont trop gros ».
Après avoir zigzagué autour de la Préfecture, bloquée par des cars de police et des gendarmes mobiles, les manifestants se sont approchés : les uns intrépides, pire, prêts à en découdre, d’autres redoutant des violences. Des billes de peinture lancées sur les policiers, peut-être des cailloux (des gamins, m’a-t-on dit, en avaient plein les poches), comme la semaine dernière, les policiers ripostent sans attendre : grenades lacrymogène à profusion. Malgré les masques et les bidons d’eau pour se mouiller le visage, la foule refoule. Des manifestants ne sont pas protégés car ils ont été arrêtés dès leur arrivée à Besançon, fouillés et leurs masques de protection ont été récupérés par les policiers.
Tout le quartier est désormais envahi par ces gaz. En s’éloignant, on prévient les familles avec enfants qu’il vaut mieux rebrousser chemin. La police arrête plusieurs manifestants vers Chamars, avec l’aide de policiers en civil. Même si la rumeur affirme que des escadrons quadrillent la ville, les passants accélèrent le pas dans la nuit pour effectuer les dernières courses pour Noël.
PS: on comprendra que j’ai un peu payé de ma personne : non seulement en prenant des photos du haut de la grande roue mais aussi en recevant, à distance, une bonne dose de gaz lacrymo.