Une action coup de poing devant le QG mène une femme devant le juge
9 août 2022
Rédaction Radio BIP (350 articles)
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Une action coup de poing devant le QG mène une femme devant le juge

La mort de Seïf B. a été un choc pour une grande partie de la ville de Besançon. Une situation qui a fait les choux gras d’une certaine presse friande de « faits divers » qui n’a pas hésité à utiliser l’unique version des personnes incriminées dans cette affaire, pour les dédouaner de toute suspicion. Et suspicion il y a, car la famille a porté plainte contre X, en désignant le cogérant de la discothèque « le QG » et l’un de ses employés, pour avoir pourchassé leurs fils avec une gazeuse à la main sur 500 mètres, avant qu’il ne soit retrouvé mort dans un espace sans issue, au pied de la Citadelle.

Nous reviendrons sur cette situation, avec une enquête journalistique sur laquelle nous travaillons depuis deux semaines, mais il était important de comprendre le contexte, car une nouvelle « situation » arrive devant la discothèque « le QG »

Nous sommes le 4 août, soit 11 jours après la mort de Seïf. La discothèque « le QG », fonctionne comme à son habitude sans avoir été perturbée par le drame qui vient d’arriver. À la demande de fermeture administrative de l’établissement, de la famille et du collectif « Justice pour Seïf », le temps de faire le clair sur le décès d’un client refoulé par leurs établissement et coursé sur 500 mètres par son gérant avant d’avoir été retrouvé en arrêt cardio-respiratoire, la Préfecture a préféré laisser l’établissement fonctionner.

Ça n’est pas la seule raison pour laquelle des personnes demandent la fermeture administrative. Un collectif de riverains s’est aussi constitué, suite à de nombreuses situations de pollution sonore ou de dérangements dans le quartier au passage des clients, parfois très éméchés. Une commerçante témoigne ne plus pouvoir garder la fenêtre ouverte la nuit et devoir souffrir de la chaleur, à cause des nuisances sonores des passants en état d’ébriété. Une situation qui, d’après leur témoignage, dure depuis des mois, sans que rien ne soit fait.

La décision est certainement « difficile » pour la Préfecture, car les gérants du « QG » étaient en première ligne et interlocuteurs privilégies de la Préfecture, pour dénoncer la situation des professionnels de la nuit pendant la période du Covid. Grâce à leur interventions multiples, leurs établissements avaient d’ailleurs été aidés financièrement par la région (entre autres) pour résister pendant la période de fermeture. Les demandes des riverains, ne sont pas, d’après leur témoignage, prises en compte à aucun niveau.

C’est dans ce contexte qu’il y aura une altercation devant « le QG » le 4 août dernier. Un riveraine, venue exprimer son ras-le-bol, va essayer de faire une action coup de poing pour attirer l’attention sur l’établissement.

Tout commence à quelques pas du « QG. » D’après le témoignage d’une personne sur place, un groupe de jeunes passe dans le quartier et se dirige vers l’établissement. Une coïncidence qui enclenche une discussion sur la situation de l’établissement et les derniers événements tragiques. Des insultes fusent, ce qui met le feu au poudre. Trop c’est trop pour la riveraine (qui avait consommé de l’alcool d’après le procès verbal policier). Elle décide de mettre en place une action contre l’établissement. Munie d’un sac de crottes de chat, elle va aller devant l’établissement, les jeter en criant des slogans contre la discothèque. C’est à ce moment là que des employés de la boite de nuit vont sortir la repousser. D’après son témoignage, prise de panique, elle va sortir un couteau à cran d’arrêt et menacer de l’utiliser contre elle-même. À aucun moment elle ne va le retourner vers les employés de sécurité, à aucun moment elle ne va tenter de l’utiliser contre eux. Des agents de la BAC sont appelés en renfort par l’établissement, qui vont l’arrêter, sans que le le couteau ne soit utilisé (elle avait été désarmée et plaquée au sol par les employés de l’établissement).

Comment avons-nous ces informations ? Simple travail journalistique : les témoins sur place, la déposition des employés de l’entreprise de nuit, la lecture du juge dans la salle d’audience : « il ne vous est en rien reproché d’avoir voulu ou tenté de porter des coups » répétant « vous n’avez pas cherché à planter » ; la Procureure même indiquera qu’il n’y avait « aucune intention de toucher quelqu’un. » Et les dépositions des victimes attestent bien « qu’ils n’ont pas été visés par des coups. »

Ces informations sont claires et limpides, pour les victimes, pour la mise en cause, pour le juge, pour la Procureure. Mais c’est sans compter sur le « travail » des faits-diversiers locaux qui ont titré en grandes lettres : « Elle tente de poignarder les videurs du « QG » pour venger Seïf« . Un article qui va inventer une histoire de toute pièce, ou il est fait état d’une femme d’une cinquantenaire d’années qui avait « tenté de planter les portiers à coup de couteau« . Rien que ça…

Copie d’écran Facebook de l’article incriminé

La mise en cause va déclarer à la barre : « ce n’était pas approprié, mais les circonstances ont fait que… pour moi, cette entreprise représentait un danger. Mais je n’ai voulu blesser personne. » Pour cela, elle se trouvait devant le juge pour « violences volontaires aggravées par les circonstances d’alcoolisme et de possession d’arme » (222-13 CP) ainsi que de « port d’une arme de catégorie D » (R.315-1 à R.315-4 et R.317-11 à R317-12 CSI).

La procureure va tout de même attester de son état de fragilité, tout en réclamant 12 mois de prison, 6 avec sursis et 6 fermes avec mandat de dépôt. Le tribunal va finalement décider d’une peine de douze mois de prison : six avec sursis probatoire, six autres sous bracelet, avec des peines accessoires, dont l’obligation de soins, stage de citoyenneté, interdiction de port d’arme, interdiction de fréquenter un débit de boisson, interdiction d’entrer en contact avec les victimes ou de paraître aux abords immédiats du « QG ».

 

Emma Audrey/Toufik-de-Planoise

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