1 000 à 1 500 manifestants contre la loi « sécurité globale » à Besançon
28 novembre 2020
Toufik-de-Planoise (97 articles)
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1 000 à 1 500 manifestants contre la loi « sécurité globale » à Besançon

Ce vendredi 27 novembre, un front commun s’est élevé contre la loi « sécurité globale » et plus généralement afin de dénoncer le recul des libertés individuelles et publiques. Avec un rassemblement fixé la veille d’une date nationale scrutée, la capitale comtoise apparaît comme une ville-test présageant un retentissement considérable partout en France. Plus d’un millier de manifestants ont ainsi battu le pavé, assumant également dans la forme tant par l’expression que la poursuite en « cortège sauvage » une lancée inédite depuis le début de la pandémie.

Aperçu de la place Pasteur vers 18h15.


Au sursaut général soudain, une amnésie collective ancienne.
L’appel du jour était soutenu par de nombreuses organisations politiques (À Gauche Citoyens, Générations, E.É.L.V., P.C.F./J.C., L.F.I., Ensemble !, N.P.A., L.O., F.A.), des O.N.G. de défense des Droits de l’Homme (Collectif des Libertés Publiques, L.D.H., Amnesty International, M.R.A.P.), des associations (A.C. !, C.N.L., C.D.D.L.E., SolMiRé, États généraux des Migrations, A.N.V.-Cop21, Alternatiba, Jardins des Vaîtes), des syndicats de travailleurs (C.G.T. , F.O., F.S.U., S.U.D./Solidaires), et divers regroupements informels (gilets jaunes, autonomes, étudiants).

Les annonces législatives et les récents scandales ont permis de dessiner une union sacrée, au moins le temps d’une soirée. Mais les dérapages et alertes ne datent pas d’hier : que ce soit la répression des samedis aprèm’ symbolisée par « l’affaire Mathias » en mars 2019 ou les bavures du quotidien comme le tabassage d’un mineur en juillet 2020 à Planoise, les motifs d’indignation et les possibilités de rendez-vous n’ont jamais manqués ici non plus. Les quartiers, mobilisés le 13 juin dernier, affichaient cette fois une absence symptomatique dans cette synergie.

Une dizaine de journalistes régionaux ont aussi fait acte de présence, dont figuraient de manière surprenante les représentants de rédactions « mainstream » telles que l’Est républicain ou France 3 Franche-Comté. Éric Barbier, par ailleurs membre du syndicat majoritaire S.N.J., s’est ainsi exprimé à propos des fameux principes garantissant la liberté de la presse. Mais après deux années de relative passivité quant aux atteintes multiples et manifestes de leurs confrères indépendants, cette visibilité unanime et surtout fulgurante en a là aussi surpris plus d’un.


Un réveil qui sonne comme une démonstration de force.
L’affluence fut significative, puisque le nombre de participants estimés oscille entre 1 000 (autorités) et jusqu’à près de 1 500 d’après certains observateurs (organisateurs). Au lancement des prises de parole jusqu’au départ du cortège peu après 18h30, la place Louis Pasteur était en tout cas noire de monde. Autre élément révélateur, les défilés officiels habituellement plutôt avares en tournures radicales ont cette fois tout de suite cédés aux slogans tranchés. « Tout le monde déteste la police » a ainsi résonner presque d’une seule voix et sur une bonne part du parcours.

Formellement toléré jusqu’à la Préfecture, le cortège n’a pourtant tenu aucun compte de cette limite. C’est tout naturellement que les protestataires ont poursuivi sans escale jusqu’au commissariat central, où les attendaient plusieurs dizaines d’uniformes issus des rangs locaux et d’une section de C.R.S. spécialement dépêchée. Le gros des troupes est alors toujours là, occupant la voie de tram’ du corps de garde de Chamars aux abords du Kiosque. Alors que le face-à-face s’amorce, le seul agent casqué est sommé par sa hiérarchie de se découvrir en gage d’apaisement…

Finalement la confrontation redoutée n’aura pas lieu, la forteresse retranchée de la Gare-d’eau demeurant à nouveau préservée des agitateurs. Ce qui n’empêchera pas une tension tiède de s’installer pendant un moment, et les interpellations, quolibets, ou offenses diverses, de pleuvoir sur les « gardiens de la paix. » Quelques trente minutes d’oppositions verbales plus tard, environ deux-cent téméraires décident de reprendre la route afin de gagner la vieille-ville. Ils finiront sur le pont Battant, entre musiques, chants, et danses, jusqu’à se disperser complètement vers 20h30.


« Nous refusons cette pente dangereuse. »
À l’origine de ce vent de colère, il y’a d’abord un contexte de crise sanitaire entraînant des conséquences économiques et sociales extrêmes. Rarement la contestation n’a été aussi pléthorique et étendue sur une période donnée dans la cité, de l’éducation au secteur médico-social, en passant par les blouses blanches, l’hôtellerie-restauration, ainsi que les chômeurs et retraités. Il y’a ensuite et surtout les mesures jugées restrictives, que deux dossiers parisiens ont matérialisé : le tabassage d’un homme le samedi 21, et l’expulsion d’un camps de migrants le lundi 23 novembre.

Les initiateurs ont ainsi évoqué cet ensemble au micro : « avec ces exemples, la population prend pleinement conscience des dangers du projet de loi de sécurité globale et de son article 24, qui s’inscrit dans la droite ligne de la dérive autoritaire actuelle. Nous refusons, dénonçons et alertons sur cette pente dangereuse. » Séverine Véziès, après avoir cité plusieurs victimes connues en France, n’hésites pas à résumer ainsi la situation : « sans vidéos, pas d’images ; pas d’images, pas de violences ; pas de violences pas de poursuites ; c’est le règne de l’impunité qui s’instaure. »

Le D.D.S.P. Michel Klein met en garde contre les amalgames, estimant que « les éventuelles fautes des uns ne doivent pas rejaillir sur toute la profession. » Il tente aussi de rassurer, précisant que toute captation et diffusion resteront garanties. D’autres gradés soutiennent ce texte, indiquant la nécessité de préserver des informations qui pourraient être utilisées en représailles. « Nous avons en tête l’attentat de Magnanville », précise l’un d’eux. Un argument qui ne convainc pas l’ex-parlementaire Barbara Romagnan, pour qui les dispositions existantes sont suffisantes.


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