Violente agression à caractère raciste à Besançon
2 février 2021
Rédaction Radio BIP (350 articles)
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Violente agression à caractère raciste à Besançon

Dans la soirée du premier février, un entrepreneur de 35 ans a été attaqué violemment par un homme, au centre-ville de Besançon. L’agresseur, bien connu des services de police, est un identitaire qui a un parcours militaire dans la guerre du Donbass.

Nous avons rencontré la victime. Il témoigne :

« Je sortais d’un rendez-vous professionnel. Je suis allé payer à l’horodateur, quand j’aperçois quelqu’un d’un grand gabarit, qui se dirige vers moi et qui me dit « t’es de la police, t’es de la police ».

Je lui dis, non. Non, je ne suis pas de la police, laisse-moi passer. Là je recule… Je recule car je sentais qu’il était dans un état second. Il me crache dessus et là, j’enlève mon manteau et je lui dis : Regarde, je suis en costume, je sors du travail, laisse-moi rentrer chez moi. Après il me dit, « ah… un arabe en costard » et il commence à courir, ses yeux sont exorbités. J’ai senti que cette personne voulait me tuer. Après, il s’est dirigé vers moi et il a commencé à m’assener des coups ; des coups au visage. J’en ai esquivé quelques-uns. J’ai essayé d’en donner quelques-uns, pour me défendre, comme je pouvais… Mais il faisait deux ou trois fois mon gabarit. Je savais que je n’avais aucune chance, mais il fallait que je me défende au mieux. Après, on est tombé au sol, et là, il m’a frappé violemment. J’ai aujourd’hui 2 côtes cassées ; j’ai un hématome à l’œil et parce qu’il m’a étranglé, j’ai des douleurs aux cervicales.

J’ai eu la chance que la police soit intervenue rapidement… C’est même ce qui l’a fait fuir. Quand il a pris la fuite, je n’ai même pas eu le temps d’appeler la police qu’il était déjà interpellé.

Il y avait quand-même beaucoup de policiers autour de lui pour pouvoir le maîtriser. Ensuite ils l’ont embarqué. Les pompiers sont venus me chercher et j’ai fini à l’hôpital »

L’agresseur présumé est toujours en garde à vue à l’heure de la publication de cet article. Le Procureur de la République, Étienne Manteaux, confirme : Il sera déféré au tribunal, en comparution immédiate, le lendemain. Il est connu des services de police, défavorablement. Retour sur le parcours identitaire de l’agresseur

Philippe T. a vingt-six ans. Bisontin pur jus, il demeure dans une maisonnée près de la City avec sa mère, après la séparation parentale. Contrairement à leur labeur entièrement tourné vers la restauration ; à l’adolescence, il s’oriente vers le bricolage et la mécanique. Il est aussi attiré par la politique. Il fait ainsi ses premières armes au sein du groupuscule identitaire « Front comtois », où il est alors repéré à l’édition 2012 du C9M à Paris. Mais le mouvement se délite et plusieurs factions émergent, en particulier celle des « Werwolf Sequania » dans la capitale comtoise. Cette formation paramilitaire s’illustrera par de multiples agressions en 2012-2013, ayant par ailleurs pour quartier général « le Bunker. » Il s’agit d’une cave réaménagée en bar privé à Bregille par un des historiques du milieu, où sa présence à des soirées est documentée de 2014 à 2015.

Il sollicite et obtient une licence de tir, comme le confirment des habitués du stand de Chaudanne où il venait périodiquement avec son fusil à pompe. On le retrouve ensuite en uniforme, vantant lui-même son enrôlement auprès de la formation néonazie « Azov » sur le front du Donbass en 2017. Il s’exhibe alors kalachnikov à la main, faisant le salut hitlérien, ou de retour dans la région par des entraînements au corps-à-corps sur un terrain de la Chapelle des Bois.

Entre-temps, il est condamné pour violences conjugales et interdit de résidence – mais pas de séjour – pour le département du Doubs, durant neuf mois. Philippe T. apparaît ensuite avec les gilets jaunes, sur les ronds-points de l’agglomération, banderole en main ou comme à Paris le fameux 1e décembre 2018 durant lequel son copain « le Sanglier » fut soupçonné de dégradations à l’Arc de Triomphe.

Il est mis en cause comme participant aux descentes de 2019 et 2020 dans les bars du vieux-centre, là encore nommément cité et plusieurs fois photographié regroupé avec ses amis de conviction et de lutte. Il vivote de prestations sociales, en animant un garage au noir, ou par de petits boulots comme livreur chez UPS. Il se montre sommairement auprès des ultras du Kop Boulogne, lors d’un match de foot entre Mannheim et Kaiserslautern en Allemagne. Fin 2019-début 2020 il s’exile en Savoie avec Maxime P., un de ses fidèles camarades de tabassage non loin du domicile paternel de ce dernier. Ils fondent alors leur propre entreprise, retapant et revendant des véhicules surtout de marque BMW. Mais le binôme ne manque pas non plus de nouer des liens avec les radicaux suisses, apparaissant dans plusieurs cessions d’entraînement au combat avec le « Swastiklan. »

La victime est aujourd’hui suivie médicalement. Un premier ITT de 3 jours a été déclaré par le médecin légiste. Un second rendez-vous médical, ce mercredi, donnera un résultat plus clair des ITT. Une prise en charge psychologique est aussi envisagée.

« Aux policiers, j’ai décrit les faits et les insultes racistes qu’il avait proféré à mon encontre, donc « un arabe en costards, je vais me le faire » et puis quand j’étais au sol, qu’il était en train de me frapper, il disait « sale arabe je vais te tuer, sale arabe je vais te tuer ». Quand j’ai dit ça à la police, ils m’ont dit que ça correspondait bien au profil de la personne.  »

La victime n’aurait jamais pensé que celà puisse lui arriver un jour. « Je suis originaire de Besançon, j’ai fait toute ma vie ici, à Besançon ; j’ai voyagé aussi à travers le monde, dans des endroits qui pouvaient paraître dangereux mais je n’ai jamais été confronté au racisme. Je ne l’ai jamais vécu. Donc je n’y croyais pas quand ça s’est passé, je ne m’attendais pas à ce que ça puisse exister et c’est ce qui m’a profondément choqué. A 200 mètres de chez moi on était prêt à me tuer, juste parce que j’ai des origines qui déplaisent à ce monsieur ou à ses idéologies. »

Suite à la violence de l’attaque, il ne voulait pas vraiment témoigner publiquement. Peut-être aussi que la pression médiatique pouvait être défavorable et la peur des représailles est présente pour les victimes de ce genre d’agression. Cependant il a été convaincu par son ami Rémy Vienot (président de l’association de défense des gens du voyage « Espoir et Fraternité Tsiganes ») qui l’a inspiré pour dénoncer cette agression raciste. « Une fois qu’on a vécu une agression raciste, c’est plus pareil. C’est un choc profond. C’est réel, c’est vrai. Le racisme ça naît de petites idées, ça naît de petites phrases. Ça naît de petits ingrédients comme ça qui font qu’on conforte une idéologie qui dans la tête de certaines personnes incultes et totalement en marge de la société, veulent venir et tuer. C’est profondément choquant. Ils n’ont pas de place dans cette société. »

Il aimerait que les pouvoirs publics s’engagent beaucoup plus. Il ne s’explique pas comment des groupuscules comme « Génération Identitaire » ne soient pas encore dissolus. « Il faut que le gouvernement envoie un message fort »

Journalistes: Emma Audrey / Toufik-De-Planoise

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