14 juin 2017 Share

Le Préfet du Doubs, condamné par la justice

Le Préfet du Doubs vient d’être condamné par le Tribunal de Grande Instance de Meaux, ce 13 Juin 2017 à payer la somme de 500€ en dommages et intérêts. Le texte exact de la condamnation: « En application des articles 37, alinéa 2 de la loi du 10 Juillet 1991 et 700 du code de procédure civile, à verser la somme de 500€ à Maître Ludovic Beaufils, avocat au barreau de Meaux représentant et assistant » une famille de migrants serbes.

Cette condamnation arrive suite à la procédure d’expulsion d’une famille de migrants Serbes avec enfants en bas âge, considérée donc irrégulière par la justice.

Les faits

Le père de la famille, assigné à résidence en vue d’une expulsion vers l’Allemagne, s’est retrouvé en rétention, pour des raisons « d’horaire matinal du vol de retour ». Plus concrètement, la police a décidé de mettre en prison une personne – au centre de rétention de Mesnil-Amelot, proche de l’aéroport de Roissy –  car le vol de l’expulsion était .. un peu trop tôt pour le déplacer le matin. En gros, la distance entre le lieu de résidence forcée et l’aéroport ne permettait (sauf à passer à la vitesse ultrasonique) de le transporter vers l’aéroport. Du, coup, pour faire simple, la décision de le mettre en détention provisoire sans appui légal semblait plus … simple. Illégal … mais techniquement plus simple.

C’est symptomatique d’une société où les êtres humains sont traités comme de la marchandise, qu’on entrepose sans état d’âme. Où l’état d’urgence généralisé donne un pouvoir exceptionnel aux fonctionnaires d’état qui, dans ce cas précis, n’arrivent plus à saisir ce qui est légal et ce qui ne l’est plus. Mais c’est dans ces cas précis qu’on peut prendre la mesure de la démesure.

Le père en question, nous l’avons rencontré. Il n’était pas seul. Il est en France avec sa famille. A la recherche d’un endroit qui ne les maltraite pas à cause de leurs origines, il est passé par l’Allemagne, pour arriver en France.

Sa femme et ses 3 enfants étaient avec lui. Un énième traumatisme. Ça ne compte presque plus. En Serbie, c’est pire, nous dit-il. Et, justement, comment pouvait-ils imaginer qu’ils allaient revivre le même cauchemar en France.

3 familles avec 6 enfants à la rue

Installées depuis 2 semaines déjà, devant le poste de police (parking Chamars) pas loin de l’installation de l’artiste Sasha Kurmaz sur le droit à l’asile des migrants, les familles sont en situation plus que précaire : pas de nourriture, pas de toit, pas de lit, pas de douche et surtout, pas de possibilité de se loger un minimum. Car, nouvelle disposition de la préfecture, si les familles se retrouvent dans une tente, le 115 refuse systématiquement de leur trouver une place.  Une façon de « transmettre un message », dit un membre du collectif d’aide aux migrants. Et le message est clair: « ne venez plus ici, on vous accueille mal »

L’état est donc entré dans une nouvelle phase, où des enfants sont obligés de dormir sur le béton, pour expliquer au monde entier qu’il ne faut pas créer un « appel d’air ».

La situation du droit de séjour des familles est légale. « Ce sont des personnes qui entrent dans un dispositif tout à fait légal de demande d’asile, ils sont enregistrés, ils ont des rendez-vous à la Préfecture, il y a des prises d’empreintes, des prises de témoignages, etc… Donc du moment où ils sont dans ce genre de procédure, ils ont le droit légal d’être hébergés temporairement », nous indique le membre du collectif.

La situation est critique et avec la chaleur et le bon temps, la population semble plutôt indifférente, mis à part quelques personnes qui accompagnent les familles.

A ce jour, des enfants en bas âge n’ont pas de couches, pas de lait. Les 3 familles avec 6 enfants se partagent le peu de nourriture qu’ils ont. Ils ont souhaité nous montrer le repas : un salami et du pain… pour tout ce monde.

Ils nous ont d’ailleurs prié de relayer un appel à la solidarité. Et c’est ce que nous faisons.

Ils ont besoin de boissons, nourriture, habits, couches pour bébé. Ils se trouvent le soir au square Granvelle, pour  avoir au moins un lieu un peu plus sûr pour dormir, car ils nous ont confié qu’ils ont peur la nuit à coté du commissariat – une famille avec enfants a été agressée avec du gaz lacrymogène il y a peu de temps, sans que les forces de l’ordre ne souhaitent intervenir.

Ndrl: Une vidéo avec l’interview des familles sera publiée sous peu.

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Emma Audrey

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- Journaliste grand reporter.